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Comment se défendre en cas de copie de votre création ?

Quelqu'un a copié mes créations : défendre ses droits en 3 étapes

Par Gilles Berrih
Publié le 09/12/21

Photographie reproduite sur un site internet pour illustrer un article, meuble design copié par un concurrent, création reproduite par un artiste pour créer une nouvelle œuvre… Les exemples de contrefaçon, c’est-à-dire d’utilisation d’une création par des tiers, sans autorisation de l’auteur et, bien entendu, sans rémunération, ne manquent pas. Que faire lorsque vous découvrez qu’un tiers a copié l’une de vos œuvres sans vous consulter au préalable ? Comment se défendre en cas de copie de votre création ? Creatricks vous présente 3 étapes pratiques pour agir dans une situation de contrefaçon.

1. Prouver votre paternité sur la création

Pour être en mesure d’agir, vous devrez en premier lieu démontrer que vous êtes l’auteur de la création qui aurait été utilisée illicitement.

Votre création a été divulguée au public sous votre nom

C’est par exemple le cas lorsqu’elle est commercialisée ou qu’elle a été présentée dans une exposition ou sur un site internet, sous votre nom. Vous bénéficiez alors, par principe, d’une présomption de paternité. Cela veut dire qu’à l’égard des tiers, vous êtes présumé être l’auteur de la création et qu’il appartiendra au tiers de démontrer le contraire.

Les créations à l’état de projet, non divulguées au public

Vous devez dans ce cas vous assurer de la preuve de votre paternité par un dépôt. Dans tous les cas, il est conseillé de sécuriser vos droits avant toute communication de votre création à des tiers (partenaires potentiels, par exemple).

Il existe différentes possibilités pour sécuriser vos droits :

  • chez un huissier, avec un procès-verbal de constat ;
  • par un horodatage en ligne, sur des sites sécurisés ;
  • avec l’enveloppe Soleau à l’INPI ;
  • par envoi à vous-même d’un courrier recommandé avec accusé de réception contenant les éléments détaillés de la création ;
  • par le dépôt auprès d’une société de gestion collective (par exemple : la SACEM pour les œuvres musicales, ou la SACD pour les œuvres audiovisuelles ou d’art vivant).

Attention, il ne faut jamais ouvrir soi-même les enveloppes Soleau ou le courrier recommandé que vous vous seriez envoyé, car il sera alors impossible de prouver avec certitude son contenu. L’ouverture devra se faire devant huissier pour constater le caractère certain du contenu.

De tels dépôts vous permettront de prouver votre paternité sur la création ainsi que la date de création.

L’originalité est une notion subjective qui est appréciée au cas par cas par les Tribunaux. Usuellement, on considère qu’une œuvre est originale lorsqu’elle porte l’empreinte de la personnalité de l’auteur.

Pour démontrer l’originalité de son œuvre, chaque créateur doit donc être en capacité de prouver les conditions dans lesquelles il a été amené à réaliser sa création et d’expliciter sa démarche artistique. Vous devez donc conserver la trace de ces informations, en même temps que vous procèderez au dépôt de la forme finalisée de votre création.

Pour en savoir plus sur l'originalité, lisez notre article : L'originalité en droit d'auteur : le critère de protection.

Le dépôt à titre de marque figurative ou de dessin et modèle

Dans certains cas, à condition de respecter les critères de protection, vous pouvez également déposer votre création à titre de marque figurative ou de dessin et modèle. Les formalités de dépôt doivent être accomplies auprès de l’INPI.

En plus du droit d’auteur, un tel dépôt donnera au créateur un titre de propriété industrielle sur cette création. La protection est de 10 ans pour les marques (renouvelable indéfiniment) et de 5 ans pour les dessins ou modèles (renouvelable 5 fois pour une période maximale de 25 ans).

Pour ce type de dépôts, il est vivement conseillé de se faire assister par un conseil (avocat ou conseil en propriété industrielle).

Pour tout savoir sur les marques et les dessins et modèles, c'est par ici :

2. Prouver les agissements illicites du tiers qui a copié vos créations

Important : vous ne devez JAMAIS contacter le tiers directement avant de vous être assuré au préalable de la preuve de ses agissements illicites.

Pour les contrefaçons disponibles sur internet

Si vous constatez la reproduction d’une œuvre sur un site internet, le premier réflexe est de réaliser des captures et des impressions d’écran. Un tel mode de preuve pourra cependant être contesté devant un Tribunal, s’agissant d’opérations qui seraient réalisées par le créateur lui-même.

Il conviendra de compléter ces opérations par un constat d’huissier en ligne. Même si le coût est plus élevé (usuellement entre 300 et 600 € TTC environ en fonction du nombre de pages et des contenus à constater), il s’agira d’un mode de preuve incontestable.

L’huissier pourra constater la reproduction d’une œuvre sur un site, mais également, faire acheter en ligne une copie de votre création par un tiers, pour caractériser l’existence de la commercialisation de cette copie.

Pour les contrefaçons disponibles de manière physique dans des magasins


Le constat d’achat

Si vous décidez d’acheter un exemplaire de la copie, il conviendra de faire réaliser un constat d’achat, avec l’assistance d’un huissier. L’huissier est alors accompagné d’un tiers acheteur. L’huissier ne pouvant entrer dans le magasin sans autorisation, il se contente de constater depuis la voie publique que le tiers acheteur entre dans la boutique et en ressort avec le produit litigieux et une facture. L’huissier peut alors constater l’achat du produit.


La saisie-contrefaçon

Pour les créations protégées par un droit d’auteur, un droit de marque ou un droit de dessin ou modèle, il est également possible de faire procéder à une saisie-contrefaçon. Il s’agit d’un mode de preuve efficace pratiqué par un huissier, sur autorisation d’un juge, après présentation d’une requête par un avocat.

Cette saisie-contrefaçon pourra être réalisée au siège du contrefacteur ou dans les locaux de tiers qui détiendraient des exemplaires contrefaisants (distributeurs, par exemple). Elle permettra notamment d’obtenir :

  • une copie des exemplaires contrefaits ;
  • la copie de tous documents promotionnels ou publicitaires ;
  • les éléments comptables afférents à cette commercialisation illicite pour l’évaluation du préjudice du créateur ;
  • et parfois même la saisie des recettes générées par la contrefaçon.

3. Comment se défendre si votre création a été copiée : agir à l’égard du tiers contrefacteur

Le précontentieux

Une fois la preuve des agissements illicites sécurisée, vous pourrez prendre contact avec le tiers contrefacteur et lui demander de cesser de porter atteinte à vos droits. Il est recommandé de vous faire assister par un conseil pour la rédaction d’un courrier de mise en demeure.

Le courrier de mise en demeure a pour objectif :

  1. De faire connaître vos droits sur la création aux tiers ;
  2. De lui enjoindre de cesser tous actes illicites ;
  3. De solliciter, le cas échéant, la réparation de votre préjudice.

S’ensuivent alors des discussions et négociations qui, dans l’idéal, aboutissent à la signature d’une transaction. La plupart du temps, le litige se résout à l'amiable.

Le contentieux

En cas d’échec des discussions précontentieuses, vous pourrez agir devant le Tribunal Judiciaire, avec l’aide d’un avocat dont la présence est obligatoire. La procédure contentieuse a pour objet d’obtenir la condamnation du tiers à cesser l’exploitation illicite de votre création et à indemniser votre préjudice, s’il en existe un.

Pour tout savoir sur le contentieux, consultez notre infographie et article : Comment se déroule un procès en contrefaçon ?

Exemples d’actualité sur la copie de créations antérieures

L’actualité récente a donné lieu à quelques exemples de condamnations d’artistes qui avaient reproduit dans leur œuvre une œuvre préexistante. Ces artistes invoquaient notamment comme fondement d’une telle reprise leur liberté artistique de création.

L’affaire Malka / Klasen :

La Cour d’appel de Versailles, par un arrêt du 16 mars 2018, a condamné le peintre Peter Klasen pour contrefaçon de droits d’auteur. Il avait reproduit dans l’une de ses œuvres une photographie d’Alix Malka. La Cour a estimé que la reprise de cette photographie n’était pas nécessaire à l’exercice de la liberté d’expression revendiquée par Peter Klasen.

Copie œuvre affaire Malka / Klasen
Alix Malka – YSL, Flair
Peter Klasen

L’affaire Davidovici / Jeff Koons

La Cour d’appel de Paris, par un arrêt du 23 février 2021, a condamné l’artiste Jeff Koons pour contrefaçon de droits d’auteur. Dans une sculpture, il avait reproduit une photographie publicitaire de la marque Naf Naf intitulée « Fait d’hiver », dont les auteurs étaient Messieurs Franck Davidovici et William Klein. Le Centre Pompidou, qui avait exposé la sculpture dans le cadre d’une exposition, est également condamné à indemniser le préjudice du photographe.

Fait d’hiver, Franck Davidovici et William Klein
Publicité Naf Naf
Jeff Koons

Vous l’aurez compris, pour bien défendre vos droits, il est impératif de sécuriser la preuve de votre paternité sur votre création, ainsi que la preuve des actes de contrefaçon commis par le tiers qui vous a copié. Dans de nombreux cas, le litige est réglé de façon amiable. Mais parfois, le procès en contrefaçon est inévitable.

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Et n’oubliez pas ! Chaque situation est unique, chaque cas comporte des spécificités qui entraînent une application du droit individualisée. Les informations communiquées sur la plateforme Creatricks sont d’ordre général et ne remplacent pas un conseil personnalisé. En cas de doute, n’hésitez pas à vous rapprocher d’un avocat.

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