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Contrefaçon : Combien de Dommages et Intérêts ?

Victime de contrefaçon, combien puis-je obtenir de dommages et intérêts ?

Par Caroline Le Goffic
Publié le 17/02/22

Vous êtes auteur, artiste, designer ou créateur, et vous vous apercevez que votre création a été copiée par un tiers. Mauvaise nouvelle : vous êtes victime de contrefaçon ! Pas de panique, le droit recèle un arsenal important qui vous permettra de faire cesser cette atteinte à vos droits et d’en obtenir réparation. Oui, mais justement, avant de vous lancer dans un procès, vous vous posez des questions, et c’est bien légitime. Comment est calculée cette réparation ? En cas de contrefaçon, combien de dommages et intérêts puis-je obtenir ? Creatricks vous explique tout :

Première étape : faire cesser les actes de contrefaçon

Que votre création soit protégée par le biais du droit d’auteur ou par un dessin et modèle, sachez d’ores et déjà que vous pouvez agir en justice. Pour faire cesser la contrefaçon, deux actions en contrefaçon sont possibles : l’action civile ou bien l’action pénale.

Si la contrefaçon est avérée, le juge ordonnera au contrefacteur la cessation des actes illicites. Autrement dit, le juge ordonnera au contrefacteur d’arrêter immédiatement les actes de contrefaçon, souvent sous astreinte (X € de pénalité à payer par jour de retard). Il pourra également ordonner des mesures de confiscation et de saisie réelle des produits contrefaisants.

Le cas échéant, il pourra aussi ordonner aux intermédiaires, tels que des places de marché en ligne ou bien des moteurs de recherche, de retirer les produits interdits et de déréférencer le site internet du contrefacteur.

Ça, c’est pour l’avenir… mais qu’en est-il du passé ?

Quelqu'un a copie votre création ? Découvrez comment vous défendre en trois étapes.

Deuxième étape : obtenir la réparation du préjudice : combien de dommages et intérêts ?

La copie de votre création vous a causé un préjudice dont vous souhaitez obtenir réparation. C’est à cela que servent les dommages et intérêts qui vous seront octroyés (à ne pas confondre avec l’amende, sanction pénale que le contrefacteur peut être condamné à verser au Trésor public). Mais comment sont-ils évalués ?

La loi, en France, comme dans l’ensemble des pays de l’Union européenne, prévoit une double méthode de calcul des dommages et intérêts.

Contrefaçon : première méthode « poste par poste » de calcul des dommages et intérêts

Par défaut, la méthode de calcul est la suivante. Le juge saisi doit prendre en considération distinctement trois éléments :

  1. Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;
  2. Le préjudice moral causé à cette dernière ;
  3. Les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d'investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.

Kézaco ?

Le préjudice économique

Le premier élément est classique en droit. Il vise le préjudice économique, c’est-à-dire la perte subie du fait de la contrefaçon. Vous pourrez ainsi vous prévaloir de ce que la vente par le contrefacteur des copies de votre création vous a fait perdre.

Le préjudice moral

Le deuxième élément est relatif au préjudice moral que vous a causé la contrefaçon. Au-delà de la tristesse que vous procure la copie de votre création – snif ! –, il s’agit surtout de réparer :

  • l’atteinte causée à votre réputation personnelle ou à celle de votre entreprise ;
  • la dégradation de votre image de marque.

C’est bien sûr plus difficile à quantifier, raison pour laquelle il est indispensable de vous adresser à un avocat spécialisé.

Les bénéfices réalisés par le contrefacteur

Quant au troisième élément, il est particulièrement intéressant dans la perspective d’une indemnisation juste et dissuasive. Il s’agit d’intégrer au calcul des dommages et intérêts les bénéfices illicites réalisés par le contrefacteur grâce à votre création. En d’autres termes, la loi donne ici une coloration presque punitive aux dommages et intérêts, qui vont bien au-delà de la simple perte que vous avez subie. Il s’agit de pénaliser le contrefacteur.

Prenons un exemple : vous avez créé un design qui est exploité sur un produit de luxe vendu 5 000 Euros pièce. Naturellement, assez peu de consommateurs pourront s’offrir le produit.

Supposons maintenant qu’un contrefacteur fasse une imitation grossière de votre design sur des produits bas de gamme vendus 5 Euros pièce. Potentiellement, de très nombreux consommateurs pourraient acheter ces produits.

Pour autant, la perte que vous avez subie risque d’être assez limitée, car rien ne permet de dire que ces consommateurs ont acheté le produit illicite au lieu du vôtre – les marchés sont différents.

Mais en faisant entrer dans le calcul des dommages et intérêts les bénéfices réalisés par le contrefacteur, la loi vous permet de bénéficier d’une indemnisation largement supérieure au montant de la seule perte subie.

Une affaire a déjà été jugée en ce sens : la société Dior s’est vu octroyer la somme de 50 000 Euros en réparation de la contrefaçon d’un modèle de lunettes de soleil. Le modèle authentique était vendu à 300 Euros HT et le modèle contrefaisant, 5 Euros HT. Le juge a essentiellement tenu compte des économies d’investissement et de promotion réalisées par le contrefacteur. Il a aussi surtout pris en considération l’atteinte portée à la valeur patrimoniale du produit original, qui véhicule une image de création de luxe (Cour d’appel de Paris, 18 octobre 2019, n° 18/08962).

Une méthode difficile à appliquer pour les juges

Dans les faits, cette méthode de calcul soulève des difficultés pratiques pour les juges. Pourquoi ?

D’abord, parce que leur pouvoir dépend des éléments comptables fournis par les auteurs victimes de contrefaçon. Or, il n’est pas toujours aisé d’obtenir des détails chiffrés sur les ventes réalisées par le contrefacteur.

Ensuite, parce que les juges n’utilisent pas les trois critères de manière cumulative. La loi indique qu’il faut les prendre en compte « distinctement », ce qui laisse place à un degré important d’aléa judiciaire.

Contrefaçon : seconde méthode « forfaitaire » de calcul des dommages et intérêts

La loi prévoit qu’à titre d'alternative et sur demande de la partie lésée (donc vous), le juge peut allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire.

Technique de calcul

Cette somme forfaitaire est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l'autorisation d'utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n'est pas exclusive de l'indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée.

Traduction en langage compréhensible : Ici, contrairement à la méthode précédente, le juge fixera un forfait au titre des dommages et intérêts, en se référant au montant fictif que vous auriez perçu si vous aviez accordé une licence au contrefacteur. À combien se seraient élevées les redevances ? Cette somme sert de plancher au montant des dommages et intérêts. Notez qu’à cette somme s’ajoute le préjudice moral dont nous avons parlé précédemment.

Intérêt de la méthode forfaitaire

Il peut être utile pour la victime de la contrefaçon de s’en prévaloir dès lors qu’elle dispose de peu d’informations sur les bénéfices réalisés par le contrefacteur (élément essentiel dans la première méthode). Il est alors plus simple d’envisager une indemnisation fondée sur une licence fictive.

La méthode forfaitaire est également intéressante lorsque le titulaire du droit n’exploite pas la création contrefaite, car il ne subit pas réellement de pertes dans ce cas.

Quelle que soit la méthode de calcul choisie pour évaluer votre préjudice subi, vous pourrez également obtenir que vos frais de justice soient pris en charge par le contrefacteur (frais d’avocat, d’huissier, etc.).

Alors, en cas de violation de vos droits d’auteur, dessins et modèles ou de tous droits de propriété intellectuelle, ayez le bon réflexe, consultez un avocat pour obtenir réparation de votre préjudice !

Pour tout comprendre sur le procès en contrefaçon, consultez :

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Et n’oubliez pas ! Chaque situation est unique, chaque cas comporte des spécificités qui entraînent une application du droit individualisée. Les informations communiquées sur la plateforme Creatricks sont d’ordre général et ne remplacent pas un conseil personnalisé. En cas de doute, n’hésitez pas à vous rapprocher d’un avocat.

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